Et si la ruralité avait un avenir ? par Claudy Lebreton
30 nov
C’est la question – quelque peu provocatrice dans un département comme celui des Côtes d'Armor – sur laquelle nous étions amenés à nous interroger cet après-midi au Conseil général. Nous engagions ainsi le début d’un travail, long mais passionnant, sur ce sujet : la ruralité.
Notre société est en mutation permanente et de plus en plus rapide. Ces transformations affectent nos territoires, qui ne correspondent plus en rien aux images d'Epinal que nous avons parfois à l'esprit du monde rural. La situation est pour le moins paradoxale : d'un côté, la ruralité attire de plus en plus de personnes ; les campagnes françaises et bretonnes, que l'on croyait en voie de désertification inéluctable, connaissent un regain de vitalité depuis une dizaine d'années. C'est le cas de notre département, auquel on prédisait, à la fin du siècle dernier, une lente érosion démographique, et qui, en réalité, a gagné 50 000 habitants depuis vingt ans. Les espaces ruraux sont des espaces en devenir. Et pourtant, ils sont aussi au cœur des tensions qui agitent nos sociétés. Ils connaissent les crises agricoles, la fermeture des services publics, des commerces. C’est ce paradoxe que nous voulons interroger.
Car je suis convaincu que la ruralité est une chance pour notre département. Notre rôle, en tant que collectivité départementale, est de la valoriser, de l'accompagner, de l'aider à faire émerger un mode de vie, qui cultive – sans jeu de mots – le bien-être et le savoir-vivre ensemble.
Pour alimenter notre travail, j’ai souhaité demander à Bertrand Hervieu, sociologue, membre de l’Académie de l’agriculture, de nous apporter son éclairage sur ce sujet. Je retiens de son intervention passionnante un élément particulier : la ruralité témoigne de cette nouvelle page qui s'ouvre aujourd'hui pour nos sociétés : la notion de richesses ne doit peut plus être pensée désormais uniquement en terme de création de biens marchands. Elle doit prendre en compte les liens, le bien être, et non plus seulement les biens matériels.
Edith Heurgon, deuxième invité de l’après-midi, nous a elle aussi invité, pour définir ce nouveau mode de « vivre ensemble » à un « devoir d’invention », en nous méfiant des a priori et des réponses trop faciles. Elle nous a aussi invité à être optimiste. Un beau défi dans un monde en plein doute.
Voilà pourquoi j’ai souhaité que la ruralité soit inscrite au cœur du mandat de l’Assemblée départementale. Il ne s’agit pas uniquement de réfléchir, de s’interroger, mais, demain de proposer et d’agir. Ce travail, nous ne le mènerons pas sans les Costarmoricains. Dans quelques mois, avec un film, avec des photographies, avec toute la créativité et l’originalité de nos espaces ruraux, nous viendrons en effet les interroger pour savoir comment eux aussi vivent cette ruralité, ses forces, ses faiblesses.
Dans un contexte de crise, financière, crise du capitalisme, mais aussi dans ce contexte de crise du sens, et donc de la politique, cette réflexion sur la ruralité doit nous permettre, collectivement, de dire quelle société nous voulons vraiment. Car pour moi la ruralité, moins qu’un espace géographique, c’est d’abord un modèle de vivre ensemble.
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